Deux notaires influents sont actuellement au cœur d’une affaire judiciaire en Algérie, accusés d’avoir détourné des milliers de contrats de logement de l’Agence Nationale d’Aménagement et de Développement du Logement (AADL). Cette affaire met en lumière des pratiques controversées dans la répartition des contrats immobiliers et soulève des questions sur la transparence dans le secteur du logement.
Une plainte déposée contre deux notaires de renom
Le tribunal de Bir Mourad Raïs a récemment jugé deux notaires influents : W. H., ancien secrétaire général de la Chambre nationale des notaires, et F. K., ex-président de la Chambre régionale des notaires du centre. Ces derniers sont accusés d’abus de fonction en vertu de la loi sur la prévention et la lutte contre la corruption.
L’affaire a été déclenchée suite à une plainte déposée par un notaire, N. A., qui allègue que les deux accusés auraient détourné des milliers de contrats de logement de l’AADL. Ces contrats concernaient principalement les membres de la Direction générale de la sûreté nationale (DGSN) et du ministère de la Défense Nationale.
Des accusations de détournement et de monopole
Selon la plainte, W. H. aurait obtenu la rédaction de 810 contrats destinés aux membres de la DGSN, tandis que F. K. aurait confié 487 contrats aux membres du ministère de la Défense. Le plaignant affirme que ces attributions se sont faites sans respecter les principes de transparence et d’égalité des chances entre notaires.
Des preuves écrites ont été présentées, suggérant que les deux accusés auraient monopolisé entre 2 000 et 3 000 contrats durant cette période. De plus, un partage déséquilibré des contrats aurait été constaté en juin 2022, avec seulement 400 contrats attribués à deux notaires, contre 1 348 répartis sur 18 autres notaires.
La défense des accusés et les enjeux du procès
Les accusés ont fermement rejeté toutes les accusations. W. H. a précisé qu’en tant que secrétaire général de la Chambre, il n’avait pas le pouvoir de distribuer les contrats. F. K., quant à lui, a expliqué avoir modifié les mémorandums pour garantir une répartition plus équitable des contrats.
Le procureur a requis une peine de deux ans de prison ferme et une amende de 100 000 dinars pour chaque accusé. Le verdict, attendu pour le 25 décembre prochain, sera crucial pour le système judiciaire algérien dans sa lutte contre la corruption et la promotion de la transparence dans les secteurs publics et professionnels.
Les implications pour le secteur immobilier algérien
Cette affaire soulève des questions importantes sur les pratiques dans le secteur immobilier en Algérie. Il est strictement interdit de disposer des logements AADL, comme l’a rappelé le ministre concerné. Cependant, des irrégularités persistent, comme en témoignent les réclamations de certains notaires demandant des frais supplémentaires aux souscripteurs.
Pour améliorer la transparence et l’équité dans le secteur, des mesures pourraient être envisagées, comme l’unification des polices des changements d’usage et de destination au sein du Code de l’urbanisme, ou la généralisation de certaines pratiques vertueuses. Ces propositions, inspirées de celles faites par les notaires du Grand Paris, pourraient être adaptées au contexte algérien.
Vers une réforme du système notarial ?
Cette affaire pourrait être l’occasion de repenser le rôle et les responsabilités des notaires dans le processus d’attribution des logements. Le bail notarié, par exemple, pourrait être davantage encouragé pour renforcer la sécurité juridique des transactions immobilières.
De plus, de nouvelles obligations d’information pourraient être mises en place, comme c’est le cas dans d’autres pays où les propriétaires doivent informer les acquéreurs sur certains risques liés à leur bien immobilier.
En attendant le verdict de cette affaire, il est clair que le secteur immobilier algérien fait face à des défis importants en termes de transparence et d’équité. Les autorités et les professionnels du secteur devront travailler de concert pour restaurer la confiance du public et garantir un accès équitable au logement.